Auteur : Patrick Chamoiseau
Qui de mieux que Patrick Chamoiseau pour nous parler de la parole ? Lui dont l’écriture se dit (ou s’écoute) au moins autant qu’elle se lit.
Ici il s’agit d’évoquer les conteurs créoles et plus précisément le dernier d’entre eux, Boulianno, le maître de la Parole.
A la fois entretien, récit d’initiation & conte (évidemment) on entre dans un tunnel où l’auteur (Chamoiseau) interview le narrateur de l’histoire qui lui raconte la recherche quasi mystique de Boulianno, un Papa conteur qui vieillard parmi les vieillard s’était pour ainsi dire effacé, laissant un grand vite, notamment dans les veillées mortuaires, là où il officie habituellement. Sa disparition est d’autant plus grave qu’il n’a aucun successeur nommément désigné.
Le narrateur file donc en montagne à la recherche de ses derniers lieux d’habitation connus, accompagné de Bébert, féru de sciences et de mathématiques et de Man-Delcas, un vannière initiée. Ils seront accompagnés d’une jeune fille qui – horreur – pourrait postuler à devenir à son tour maître de la parole et de Populo, joueur de tambour qui pourrait aussi postuler à cet honneur.
Plus on monte dans les mornes, plus on s’enfonce dans les ressorts de la Parole et dans l’histoire de la Martinique et plus on renonce à essayer de tout comprendre.
Il faut se laisser emporter par le verbe, la magie et les histoires.
[…] j’avais compris qu’aller direct aux vérités abîme la question, sacrifice le vivant.
p331
J’ai eu un peu de mal à enchaîner tout le livre car l’histoire est parfois un peu longuette, mais la surprise de la langue de Chamoiseau (même si parfois l’énumération des noms de plante, d’arbre ou autre est roborative), les personnages sont attachants et sa connaissance de l’univers des conteurs (que l’on perçoit surtout vers la fin) est incroyable.
Une bouffée d’air, c’est toujours un exercice extrêmement plaisant que de lire cet auteur, même si j’avais préféré Une enfance créole ou Texaco à la structure plus classique.
